Von Pierre Landry
Comment peut-on dire après quatre années formidables passées au Cameroun dans un hôpital de brousse «qu'en tout cas, si on repartait, ce ne serait pas pour un poste du même genre...» et au moment même de le dire, le regretter déjà?
Cette question mhabite depuis mon retour, comme médecin et comme ancien envoyé du DMEchange et Mission (Département missionnaire des Eglises protestantes de Suisse romande) et je vis la réponse à deux niveaux. Dabord dans la tête, où se mêlent quelques concepts modernes de la mission quon nappelle plus comme ça dailleurs concepts qui ont pour noms développement, collaboration, échange Nord-Sud, partenariat, soins de santé primaire...; puis dans le cur, avec des souvenirs vivants de gestes et de contacts avec des hommes et des femmes, en partie pour les soigner, mais beaucoup aussi par simple plaisir dêtre avec eux.
Depuis 1996, ces questions, non gratuites, ont également animé les réflexions du Groupe dentraide médicale (GEM), une commission du DMEchange et Mission. Ce groupe avait jusque-là fait un travail magnifique de soutien et dencadrement des médecins et infirmières envoyés par le DMEchange et Mission auprès des Eglises-surs qui en faisaient la demande, et ce dautant plus facilement que la plupart des membres du GEM sont eux-mêmes danciens envoyés. Ainsi, au travers des envoyés, le GEM avait un lien privilégié et continu avec les Eglises outre-mer.
Mais avec le manque de candidats au départ pour létranger, phénomène lié en grande partie à des facteurs sur lesquels le DMEchange et Mission a peu dinfluence, le GEM qui avait rythmé ses rencontres sur le rythme des retours, des congés et des visites des envoyés, a siégé de moins en moins souvent. Dans le domaine médical pourtant, les partenaires doutre-mer continuaient de demander (on aurait envie de dire comme si de rien nétait), des médecins ou des infirmières, il est vrai en moins grand nombre quauparavant.
Pour ces raisons, un questionnaire a été envoyé à tous les membres du GEM ainsi quaux ex-envoyés médicaux afin, dune part détablir linventaire des capacités mises à disposition par chacun, et dautre part pour démarrer une réflexion à propos du rôle du GEM.
Nos expériences personnelles, et les rapports qui lient toujours plusieurs des membres du GEM avec nos partenaires du Sud, ont servi de point de départ à la réflexion. Des contacts ont été repris avec quelques structures sanitaires auprès desquelles des envoyés avaient travaillé, notamment au Rwanda et au Cameroun, pour les encourager à réfléchir en même temps que nous à dautres modalités déchange ou de liens que le «simple» envoi de personnes dont le DMEchange et Mission ne dispose plus.
Plusieurs pistes de réflexion ont été lancées:
Cette liste nest pas exhaustive, elle nest que le reflet de quelques-uns des besoins des partenaires contactés. La réflexion doit se poursuivre et éventuellement englober dautres aspects.
Le récent Synode missionnaire (législatif du DMEchange et Mission) ma rendu attentif à une autre piste éventuelle concernant le rôle du Groupe dentraide médicale (GEM) en Suisse, dans les relations avec dautres sous-groupes dONG ayant un rôle dans le domaine médical et dans les relations avec les paroisses, ce dautant plus que se développent des échanges entre jeunes paroissiens dici et doutre-mer, échange qui pourraient impliquer des collaborations sur le plan médical.
Toutes ces réflexions, encore embryonnaires pour la plupart, ne balaient en aucun cas le travail daccompagnement à faire avec et par des envoyés lorsquil y en a, et ceci pour deux raisons fondamentales. Premièrement, il y a des urgences auxquelles il faut répondre par simple compassion, parce que lorsquon le peut, on aide quelquun qui souffre. Deuxièmement, si on veut prétendre à une relation fraternelle avec autrui, en loccurrence des Eglises-surs doutre-mer, il faut avoir le courage de prendre contact et apprendre à connaître cet autrui, même si la démarche ne se fait pas selon nos propres critères. Les envoyés, au-delà de la richesse des relations quils peuvent établir eux-mêmes, sont des signes quune relation est désirée entre les partenaires engagés.
Si comme le montrent ces lignes, lavenir du GEM nest pas encore bien défini, lexpérience de léquipe en place depuis longtemps devrait, avec lénergie de quelques nouveaux arrivants, permettre une nouvelle vision (mission?) bénéfique pour tous les partenaires concernés.
*Dr Pierre Landry est président du Groupe dentraide médicale (GEM) du DMEchange et Mission à Lausanne